Cassséééé
--> Raymond 1 - Fils spirituel 00
Et voilà. C'est fait. C'est réglé. Emballé. Pesé. Emporté. Sodo... euh non ça pas.
Vous avez été nombreux à m'envoyer des courrier enflammés réclamant à corps et à cris mon retour, mes interventions, mes prestations.
Public chéri, je vous aime.
Il y a fort longtemps que ma boîte aux lettres n'avait plus débordé comme ça. Au moins depuis que le charmant Désiré Moitoutentié ne m'envoit plus des lettres du Burkina-Faso dans une tentative désespérée de sauver l'héritage secret du Prince de sang royal qui voudrait faire transiter par mon compte en banque la totalité des 250 millions de dollars que le fisc burkinabé recherche depuis la destitution de son père et que grâce à moi il pourra retrouver son honneur perdu et qu'il me laissera dix pourcent de la somme en dédommagement pour mon aide généreuse à sa cause présentement (je lui ai envoyé la totalité de mes coordonnées bancaires ainsi que le code secret de ma carte bleue comme il le demandait afin qu'il puisse opérer le transfert avec la rapidité du jaguar le soir au fond de la savane endormie comme il me le disait si bien dans ses lettres dont le manque de qualités rédactionnelles n'avait d'égale que la force de la juste cause défendue si bien par ce héros des temps modernes qu'il fallait que j'aide par tout les moyens, c'est un devoir quand on a hérité comme moi de tant de talents naturels et qu'on veut un monde plus juste et moins injuste).
Enfin, donc, disais-je, vous m'aimez. C'est en tout cas ce que je retiens de toutes ces lettres d'admiration que j'ai reçues de vous et que j'ai lues et relues mille fois pour percevoir jusqu'au fond de mon âme la sourde excitation fébrile qui agitait vos mains alors que vous écriviez, sans doute à la lueur d'une lampe de poche dissimulée sous la couette pour ne pas que papa se rende compte que je ne dors pas encore alors qu'il est déjà 20h30. Comme quand Roro et moi partagions nos jeux d'enfants dans ma chambrette les week-ends et que sa maman voulait bien qu'il dorme à la maison "pourvu que nous n'échangions plus nos appareils dentaires".
C.L. de Toulouse, ta lettre m'a fait vraiment plaisir et a provoqué en moi un émoi indistinct que je ne saurais décrire sans le dénaturer, mais qu'importe, ce sera l'objet de mon prochain article.
Vous m'avez réclamé. TU m'as réclamé, toi public qui me lis en sachant que la vérité se trouve dans les mots que je peux si bien enfiler le long du fil de mes proses comme des perles éclatantes sur une chaînette en or pour mettre en valeur toute la force éclatante des révélations que je vous offre après avoir laissé mon cerveau indéniablement supérieur - mais on ne peut rien contre la généreuse nature - opérer les réflexions subtiles qui mènent à la compréhension ultime de la réalité sordide du monde qui nous entoure de ses bras velus et mous. Et aujourd'hui je l'affirme bien fort: j'ai triomphé (si quelqu'un pouvait en douter).
Il y a quelques temps, je vous informais du début d'une quête journalistique de la plus haute importance afin de débusquer dans son trou d'animal abject le journaliste odieux qui osait se faire appeler "le fils spirituel de Raymond Tachmol". Aujourd'hui ma quète a un but, et ce but est atteint, et cette atteinte est totale, et cette totalité est immense, et c'est tout (touyoutou - comprenne qui pourra).
Suivant comme son ombre mon légendaire instinct probablement hérité de mes illustres ancètres lorsqu'ils chassaient le mamouth dans la forêt et que la faim tenaillant leurs estomacs rendait plus puissants au moment de capturer le mastodonte, je poursuivait mon scoop avec une faim ardente de cette vérité qui vient comme un cheval au galop dans la baie du mont Saint-Michel quand le soleil se noit dans l'évanescence rougoyante du jour qui se couche. Après avoir écumé les bars louches de plusieurs grandes villes connues pour leur débauche de journalistes vereux, je me résignait à l'assomante certitude: le vil scélérat était bien tapi dans l'ombre de son anonymat et il n'allait pas être facile de le démasquer.
Il me vient alors une idée de génie comme il n'en vient qu'aux géniaux génies qui ont un génie génial qui leur transmet des idées (géniales bien sûr). Poussant jusqu'au bout le culot teinté d'audace qui caractérise nombre de mes confrères mais dont je n'use que quand les circonstances désespérées me laissent penser qu'il faudra plus cette fois que ma simple perfection, je poussai sans embage les portes de la radio qui avait émis les traitresses paroles.
La charmante réceptionniste pleine de finesse, de fraîcheur et de taches de rousseur, sur son joli postérieur qui me reçut dans le hall d'entrée de la radio me considéra un instant comme si elle voulait jauger la puissance de ma détermination avant de céder sous les assauts de mes pressantes questions: <<Le taré qui se pavane en disant qu'il est le fils spirituel du gros Tachmoule ? Ouais, deuxième étage, porte 207.>>
J'avais déployé tout mon arsenal de conviction et mon travail de fond préparé depuis des jours payait enfin. Je touchait au but, à l'endroit où je me serais attendu le moins à trouver l'infame: son bureau. Les détours circonvolutionnés du destin sont parfois carrément surprenants, mais rien n'échappe à l'acharnement de Raymond Tachmol. Durant une petite panne de trois heures, seul dans la cage d'ascenseur vide, bloqué entre le premier et le second, j'avais eu le temps de peaufiner les détails de mon irruption dans l'antre du vilain. Mon esprit supérieur allait faire tout le travail pour que mon corps ne doive pas déployer sa puissance physique qui aurait, à n'en pas douter, brisé comme un fétu de paille l'échine de ce sinistre gredin.
Lorsque les portes de métal de l'ascenseur s'ouvrirent enfin, je me ruai à l'assaut du bureau 207, prêt à arracher sauvagement la porte probablement blindée qui me séparait de l'infame brigand pour lui défoncer la tronche à coups de tronçonneuse, lorsque je m'aperçu que j'avais oublié ma scie à chaîne à la maison (je m'étais entraîné à la sculpture sur glace pas plus tard que la veille et il fallait encore que je nettoye les taches de sang de mon orteil). Je frappai donc doucement à la porte, qui n'était pas fermée et s'ouvrit silencieusement sur un bureau vide. Sans hésiter plus d'une minute ou deux, je me glissai à l'intérieur et fermai la porte délicatement dans mon dos. Le nid était vide, j'étais dans la place.
Je m'installai dans la chaise inconfortable qui trônait derrière le bureau. Il fallait agir. Sur le bureau se trouvaient tous les indices dont j'avais besoin pour démasquer le criminel: une photo de son équipe d'Ultraball favorite, un vieux poing renforcé rouillé dédicacé par un certain J-P Thirioux et utilisé comme presse papier, une bombe de produit anti-puces et une photo dans un petit cadre nacré de son animal fétiche en train de ronger une charogne. Maintenant je savais.
Je me saisis d'une feuille de papier à entête du soit-disant journaliste qui n'était autre qu'un célèbre coach d'Ultraball, probablement investit dans le travail rédactionnel dans le seul but d'assurer son auto-promotion. Et j'écrivis d'une main ferme: "Monsieur le président de la ligue d'Ultraball, vous êtes méchant. Signé:" et j'ajoutai le nom qui désormais résonnera à mes oreilles comme le synonyme de l'usurpation (et malgré tout du bon goût puisqu'il m'avait choisit comme cible) incarnée. Il allait passer un sale quart d'heure lorsque le président de la ligue d'Ultraball recevrait "sa" prose. J'adressai et timbrai la bombe prête à exploser à la prochaine ouverture par son destinataire et postai le tout dans le bac de courrier "out" de son bureau (En plus c'est lui qui allait payer les frais de port, niek niek, je dégustais ma terrible vengeance !)
Il n'en fallait pas plus. Quelques jours plus tard le monde entier apprenait son éjection sans autre forme de procès du comité de développement d'Ultraball. Probablement le président de la ligue, outré par l'incroyable audace du gredin, avait-il pris immédiatement les décisions requises pour sa mise à l'écart. Que mon action avait été forte et réussie ! Il ne fallut pas attendre bien plus pour apprendre sa "démission" de son poste de coach de sa franchise anglaise. Il ne répond plus aux courriers, j'imagine qu'il a dû se cogner à un poing renforcé quelque part au détour d'une ruelle sombre et qu'on n'en entendra plus parler avant bien longtemps. Il ne faut pas se moquer du président de la fédération d'Ultraball (ni de Raymond Tachmol, d'ailleurs).
Avec le sentiment réconfortant du devoir accompli de main de maître, je rentrai chez moi pour lire et relire encore cette merveilleuse lettre de C.L. de Toulouse dont il me tarde de vous parler et qui me fait toujours autant frissoner quand je murmure tout bas dans mon lit les mots qu'il m'adresse. Ouhhhh qu'il me tarde. Ouhhhhhh....
Votre dévoué,
Raymond Tachmol
Ecrit par Raymond Tachmol, le Vendredi 28 Octobre 2005, 16:35 dans la rubrique "Nouvelles neuves".
Commentaires
SHB
28-10-05 à 18:26
"Une bombe de produits anti-puces..."
J'en étais sûr ! :)
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